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1968, victoire à la coupe des Alpes
1968, Victoire à la coupe des Alpes
«ALPINE RALLY»
Dans les années 1960, la Coupe des Alpes était l’un des rallyes majeurs du calendrier, emporté plusieurs fois par Alpine, en particulier en 1968 par Jean Vinatier à l’issue d’une course bien gérée...
La Coupe des Alpes, un rallye que nos amis britanniques appellent « Alpine Rally », cela ne vous rappellerait pas quelque chose, par hasard ? Mais oui ! C’est bien de là que vient le nom de notre marque favorite, manière pour Jean Rédélé de célébrer sa victoire de 1954 sur cette course.
Coupe des Alpes : l’Alpine pose avec, en arrière-plan, les Alpes qui ont donné son nom à cette course mythique. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault Communication / D.R.
La Coupe des Alpes était un événement très important à l’époque, mais l’épreuve a connu sa dernière édition en 1971, avec la victoire de Bernard Darniche et son Alpine A110 1600. Ce rallye automobile a été organisé dès l’entre-deux-guerres, mais il était alors très sélectif. Dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, en 1946, le « Rallye des Alpes françaises » reparaît, avec un départ fixé à Marseille. L’année suivante, il devient le « Rallye International des Alpes » car le tracé passe par des cols reliant la France, l’Allemagne, l’Autriche, l’Italie et la Suisse. Il y avait très peu d’épreuves spéciales à l’époque, principalement des contres horaires où il était très difficile de pointer dans les temps. Ceux qui terminaient les quelque 3 000 km du rallye sans aucune pénalité se voyaient ainsi offrir une coupe, baptisée « coupe des Alpes », qui allait quelques années plus tard donner son nom définitif au rallye. Au total, 166 coupes des Alpes auront été distribuées entre 1938 et 1971. Les choses sérieuses commencent dans les années 1950 où s’établit pour la première fois un classement des concurrents ; jusqu’alors, seule la distribution des coupes concluait l’épreuve, qui acquiert après cela ses lettres de noblesse en devenant l’une des manches du Championnat d’Europe des Rallyes. En 1954, Jean Rédélé décroche une Coupe des Alpes. Tous les grands pilotes rêvent alors de décrocher une victoire – ou une coupe – à ce rallye. Et les vainqueurs y reviennent car, originalité de l’épreuve, une coupe d’argent vient récompenser celui qui gagne trois coupes des Alpes, et une coupe d’or récompense celui qui y parvient d’affilée (voir encadré).
Jean Vinatier et son Alpine 1600 lors d’un contrôle de passage pendant la Coupe des Alpes 1968. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault Communication / D.R.
1968 : ALPINE SURNAGE
Après une victoire de la R8 Gordini de Jean-François Piot en 1966, le temps est venu pour les Alpine A110 de briller : elles arrivent tout juste à maturité, grâce au moteur de la R8 Gordini. En 1968, la marque de Dieppe engage ainsi plusieurs A110, sans compter les voitures des concurrents privés : une excellente présence d’Alpine, avec des niveaux de préparation différents, allant du très affûté au pratiquement standard, en cylindrée 1300 ou 1440 pour les moteurs préparés par Mignotet.
Il faut bien tout cela car il y a du beau monde. Face aux Alpine de Vinatier, Piot, Andruet, Henry, Larrousse ou Nicolas, nous trouvons ainsi la redoutable Lancia de Trautmann, l’Opel Kadett 1900 de Greder, la Ford Escort de Clark, sans oublier les très compétitives Alfa Romeo de Barailler, Bianchi ou Verrier.
C’est parti pour trois jours intenses depuis Marseille ! Soixante-quatre concurrents sont présents. Les conditions météo sont à la pluie battante pour cette première étape de près de 1 400 km jusqu’à Aix-les-Bains. Tous ne seront pas à l’arrivée, loin de là, car la course par élimination commence et ne fait que s’amplifier, bien aidée par ces conditions très difficiles.
Malgré des abandons, on trouve déjà deux Alpine en tête du classement, sur les talons de l’Alfa Romeo des frères Gamet : les deux 1440 de Piot et Vinatier. Jean-François Jacob raconte dans son livre justement intitulé Coupe des Alpes ses rallyes en tant qu’équipier de Jean Vinatier.
En rallye à l’époque, l’assistance se faisait souvent dans des lieux improbables, comme ici à la Coupe des Alpes 1968 dans une cour de ferme. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault Communication / D.R.
AVANTAGE VINATIER
La seconde journée est constituée d’une boucle autour d’Aix-les-Bains, plus courte en distance (800 km) ; avec le beau temps retrouvé, on pourrait penser que les choses seront beaucoup plus faciles, pourtant la succession des abandons se poursuit : Larrousse, Consten, Nicolas et surtout Jean-Claude Gamet, tandis que la mécanique de l’Alpine de Jean-François Piot donne des signes de fatigue qui vont l’obliger à quitter la course en fin de journée. Le duo Vinatier/Jacob continue une course parfaite : il passe sans pénalités partout, gagne des spéciales décisives, et se retrouve en tête du rallye. Mais, au milieu de l’étape, Vinatier grommelle : le témoin de pression d’huile s’allume sporadiquement. C’est une très mauvaise nouvelle. Au point d’assistance suivant, le diagnostic se confirme, il manque énormément d’huile dans le moteur. L’appoint est fait, un bidon de 10 litres est embarqué, et vogue la galère : Jean-François Jacob raconte dans son livre que, si le duo pilote/copilote est inséparable dans les succès comme dans les échecs, la future victoire de l’Alpine aura tenu aux qualités de Vinatier, qui saura à la fois ménager son moteur et tenir ses adversaires à distance.
Toujours pendant la Coupe des Alpes 1968, une Alpine traverse la France profonde, et les spectateurs sont là ! © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault Communication / D.R.
VICTOIRE ALPINE
Toute l’assistance Alpine est tournée vers l’A110 de Vinatier/Jacob, qui va consommer jusqu’à quatre litres d’huile aux 100 dans la troisième et dernière étape menant à Antibes, terme du rallye.
À l’arrivée, l’ordre est respecté. L’Alpine emporte le rallye devant l’Alfa de Barailler/Favel et la Lancia des Trautmann avec, en quatrième l’A110 de Claude Henry. Un beau podium, finalement, après une course magnifique d’intelligence de la part des vainqueurs ; c’est d’ailleurs à partir de cette date que l’on surnommera Jean Vinatier « Jeannot l’Alpin ».
Pour aller plus loin...
L’alpine GT4, image sportive
Alors qu’Alpine est spécialisée dans les voitures de sport, l’A106 à mécanique 4 CV, puis l’A108 au moteur issu de la Dauphine et enfin l’A110 qui reprend le 4-cylindre de la R8, Jean Rédélé décide d’ajouter à sa gamme un modèle susceptible d’embarquer à peu près convenablement quatre passagers. C’est la carrosserie Chappe & Gessalin, à qui l’on doit le coach qui a donné la toute première Alpine, qui va travailler sur cette GT4. Avant cela, générale. Le lancement de la Berlinette en 1962 donne l’occasion d’en reprendre les grandes lignes afin d’élaborer un modèle moins exclusif : la GT4 est sur la rampe de lancement.
En 1968, Alpine possède une gamme étoffée avec les Berlinette, monoplaces, protos et la GT4 que l’on voit à l’extrême droite. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault Communication / D.R.
Une longue carrière
La Berlinette exceptée, la GT4 est la voiture qu’Alpine aura produite pendant le plus longtemps, malgré les faibles chiffres de vente puisque seuls 263 modèles ont vu le jour. Présentée au Salon de l’Automobile de Paris fin 1962, au prix de 15 450 francs (23 000 euros actuels), elle ne sera retirée du catalogue qu’en 1969, soit en tout sept années-modèle. C’est le moteur 956 cm3 51 ch de la R8 qui est utilisé pour les tout premiers modèles, produits à 20 exemplaires, et siglés A108 L (pour « Longue »). Tous les modèles suivants seront des A110 L. L’année suivante, le moteur 956 est remplacé par le 1 108 cm3 gonflé à 66 ch de la Caravelle (type V70). En 1965, ce dernier est conservé, épaulé par le R8 Gordini de même cylindrée (V100) mais porté à 103 ch SAE. Ces deux-là sont encore présents en 1966 quand vient s’ajouter le redoutable 1 296 cm3 peaufiné par Mignotet qui, avec ses 120 ch SAE, emmène la GT4 à plus de 200 km/h. Le nouveau 1 255 cm3 Gordini 105 ch entre dans la gamme en 1967.
La GT4 surnommée « la Sauterelle » fera une dernière apparition en course à la Targa Florio en 1967. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault Communication / D.R.
Des options pour la marge
Jean Rédélé a toujours suivi un credo pour Alpine : proposer des modèles de base assortis d’un très large catalogue d’options disponibles. La raison est très simple : tous les éléments rajoutés sont vendus au prix fort, avec une marge bénéficiaire substantielle ! La GT4 ne déroge pas à cette règle et le client peut opter pour une boîte à cinq rapports, quatre amortisseurs arrière, une sellerie cuir, un autoradio, des phares longue portée… La version de base la plus chère est la 1300 S, vendue 27 200 francs (32 000 euros actuels) en 1967 et 1968, mais encore une fois les options peuvent faire allègrement grimper la note finale. La boîte 5, le servofrein d’assistance ou la peinture métallisée alourdissent le chèque en conséquence.
Bien qu’elle puisse embarquer quatre passagers, la GT4 conserve une allure de voiture sportive. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo ©Renault Communication / D.R.
À l’international
Au début des années 1960, Jean Rédélé a signé des partenariats pour que ses voitures soient vendues au Mexique, au Brésil et en Espagne. En Amérique centrale, la marque Diesel Nacional a, sous le nom de Dinalpin, produit un peu moins de 120 exemplaires de la GT4. Tout est produit sur place, seuls les éléments émanant de Renault sont importés, ainsi que les moteurs Gordini qui n’ont jamais été montés au Mexique. Mais, bien que le Brésil ou l’Espagne ont produit nombre de Berlinette, il semblerait que les GT4 n’ont pas été concernées. Quelques propriétaires sportifs ont engagé leur GT4 en compétition, mais l’apparition simultanée des A110 a très certainement tué dans l’oeuf ces initiatives. En effet, bien que joueuse, avec ses 600 kg à vide, la GT4 n’a jamais pu rivaliser avec la diabolique efficacité de sa soeur qui s’impose rapidement comme l’arme absolue en rallyes. Reste à la GT4 la possibilité d’emmener toute une famille dans des sorties « viroleuses » pour bénéficier des avantages de la première Alpine « familiale », certes, mais sportive !
Sous la marque Dinalpin, la GT4 fuit produite à environ 120 exemplaires au Mexique. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo ©Renault Communication / D.R.
DONNÉES - LE PALMARÈS DE L’ÉPREUVE
1950 : Ian Appleyard/Pat Appleyard (GB, Jaguar)
1951 : Ian Appleyard/Pat Appleyard (GB, Jaguar, coupe des Alpes, coupe d’or)
1952 : Alex von Falkenhausen/Kitty von Falkenhausen (D, BMW)
1953 : Helmut Polensky/Walter Schler (D, Porsche)
1954 : Wolfgang Denzel/Hubert Stroinigg (S, Porsche)
1955 : Épreuve annulée suite à l’accident du Mans
1956 : Paul Ernst Strähle/Hans Encher (D, Porsche)
1957 : Épreuve annulée suite à la crise de Suez
1958 : Bernard Consten/Roger de Lageneste (F, Alfa Romeo)
1959 : Paul Condrillier/Georges Robin (F, Renault Dauphine)
1960 : Roger de Lageneste/Henri Greder (F, Alfa Romeo)
1961 : Don Morley/Erle Morley (GB, Austin Healey)
1962 : Don Morley/Erle Morley (GB, Austin Healey, coupe des Alpes)
1963 : Jean Rolland/Gaby Augias (F, Alfa Romeo)
1964 : Jean Rolland/Gaby Augias (F, Alfa Romeo, coupe des Alpes)
1965 : Bernard Consten/Jean Hébert (F, Alfa Romeo)
1966 : Jean-François Piot/Jean-François Jacob (F, R8 Gordini)
1967 : Paddy Hopkirk/ Ron Crellin (GB, Morris Cooper, coupe des Alpes)
1968 : Jean Vinatier/Jean-François Jacob (F, Alpine A110 1440)
1969 : Jean Vinatier/Jean-François Jacob (F, Alpine A110 1440, coupe des Alpes, coupe d’or)
1970 : Épreuve annulée par décision préfectorale
1971 : Bernard Darniche/Alain Mahé (F, Alpine A110 1600)