Lancia Belna

Rédaction : Albert Lallement  

Une fabrication française

Au Salon de Paris de 1934, le stand Lancia France présente la petite berline Belna, qui n'est autre, à quelques détails près, que la sœur jumelle du modèle Augusta lancé en Italie l'année précédente.

La Lancia Augusta voit le jour officiellement lors du Salon de Milan en avril 1933, mais comme de coutume chez le constructeur de Turin, la présentation au public avait eu lieu à l'occasion du Salon de Paris, le 5 octobre 1932, le marché français constituant une part importante dans les exportations de cette marque. Le krach boursier de Wall Street et la crise économique internationale de 1929 vont changer profondément les règles douanières et l'importateur Lancia-France décide de produire ce modèle dans une nouvelle usine près de Paris sous l'appellation Belna.

La Lancia Belna était livrable en châssis nus pouvant être carrossés par un artisan extérieur, comme ici Pourtout qui réalisera parmi les plus beaux cabriolets de ce modèle.© IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Lancia D.R.

Ainsi, pour la première fois de son histoire, Lancia va produire des voitures de sa gamme dans une usine située hors d'Italie. La version d'origine Augusta a la lourde tâche de succéder à la Lambda, un modèle lancé une décennie plus tôt qui a fait entrer l'automobile dans une ère de modernité, tant elle apportait des techniques d'avant-garde. Citons notamment la structure monocoque autoporteuse, un moteur 4 cylindres en V très étroit ou la suspension avant à roues indépendantes. Si l'Augusta est une petite berline populaire qui a été conçue sur un modèle économique plus modeste, crise oblige, elle reprend toutefois la plupart des solutions modernes de son aînée.

Avec sa coque autoporteuse (une nouveauté pour l'époque) la Lancia Augusta présente une ligne de carrosserie surbaissée moderne malgré une silhouette encore classique.  © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Lancia D.R.

S'adapter à la crise

La crise financière mondiale de 1929 modifie de façon conséquente le paysage de l'industrie automobile mondiale. Aux années fastes du lendemain de la Grande Guerre succède une période durant laquelle les plans de fabrication et de développement initiaux sont résolument revus à la baisse faute de débouchés commerciaux. Jusque-là, Lancia ne s'était jamais préoccupé des voitures de grande série, privilégiant des modèles haut de gamme qui lui avaient permis de traverser les premiers temps de la crise grâce à la grande réputation de ses productions. Mais Lancia finit par être rattrapé par la situation économique, d'autant qu'avec des tarifs assez élevés, elle voit sa clientèle se tourner progressivement vers des véhicules de gamme moyenne plus économiques qu'elle trouve notamment chez Fiat. Aussi, dès le début des années 1930, Vincenzo Lancia, le fondateur de la marque, planche sur un petit modèle populaire qui, tout en étant dans une catégorie plus modeste, posséderait le raffinement et la technique avancée d'une Lancia de gamme supérieure. De fait, la petite Augusta va sauver financièrement Lancia et lui permettre de figurer en tête des entreprises italiennes en matière de technologie. Le prototype de l'Augusta est dévoilé au Salon de Paris en octobre 1932, mais la voiture définitive est présentée quelques mois plus tard au Salon de Milan en avril 1933, après que Vincenzo Lancia a réglé quelques soucis de brevets industriels relatifs à la fameuse carrosserie autoporteuse sans montant central. 

Sur l'Augusta et la Belna, l'alimentation en essence du carburateur Zenith se fait par gravité, depuis le réservoir situé sur le haut du tablier pare-flammes. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © © Lancia D.R.

La filiale française 

Lors du lancement de la Lamda, les entreprises américaines Budd et Chrysler se prévalurent en effet de la paternité de cette conception moderne et révolutionnaire, mais toutes deux furent déboutées, Lancia ayant déposé son brevet bien avant elles. Afin de s'affranchir des droits de douanes exorbitants touchant les voitures importées en France au début des années 1930, Lancia décide de monter une filiale de sa marque en France. Ces taxes s'élèvent à 150 % si au moins 85 % des pièces composant le véhicule ne sont pas fabriqués en France ! Le 1er octobre 1931, la filiale Lancia-France Automobiles est créée à Bonneuil-sur-Marne, au sud-est de Paris. Début 1933, une usine flambant neuve est construite sur un terrain de 5 hectares situé non loin du vieux port. L'usine de Bonneuil emploie près de 550 salariés qui ont tous été préalablement formés sur les chaînes de montage de Lancia en Italie. Le premier modèle produit par Lancia-France dès 1934 est la version française de l'Augusta, rebaptisée Belna. Puis de 1937 à 1938, l'Ardennes, la version française de l'Aprilia y sera construite. L'activité de Lancia-France cesse à l'automne 1938, peu de temps après les accords de Munich, en représailles à des sanctions prises par la France contre l'Italie après l'invasion de la Libye par les troupes fascistes. Certaines pièces mécaniques de la Belna étaient coulées dans les fonderies ardennaises de Monthermé, tandis que l'emboutissage des panneaux de carrosserie, le coulage des pièces en alliage léger et la fabrique des pièces mécaniques comme le taillage des pignons étaient effectués sur le site de Bonneuil. La Lancia Augusta et sa sœur française Belna présentent peu de différences. La Belna se distingue essentiellement par ses phares Cibié, ses instruments O.S., ses volets de calandre en tôle emboutie et ses jantes de roue ajourées. Elle reprend le niveau de finition de l'Augusta Lusso de 1934, avec son habitacle plus luxueux comprenant, entre autres, des déflecteurs en haut des vitres, des moulures de capot, un filet peint sur les flancs de caisse et une calandre en V. 

Les Belna cabriolets produites par Pourtout reprennent certaines finitions haut de gamme de la version Lusso de l'Augusta, comme les roues fils Rudge à écrou central. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Lancia D.R.

Vue du hall de l'usine Lancia-France de Bonneuil-sur-Marne où les voitures sont prêtes à être livrées, parmi lesquelles des berlines d'usine dont les carrosseries spéciales sont produites à l'extérieur.  © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Lancia D.R.

Fiche technique

Lancia Belna Berline Type F31 (1934)

•  Moteur : Lancia (type 88F), 4 cylindres en V à 18° 15', longitudinal avant

• Cylindrée : 1 195,58 cm3

• Alésage x course : 69,85 mm x 78 mm

• Puissance : 35 ch à 4 000 tr/mn

• Alimentation : carburateur horizontal simple corps Zenith 30 VEH

• Allumage : batterie, bobine et distributeur Bosh

• Distribution : simple arbre à cames en tête, 2 soupapes inclinées en tête par cylindre

• Transmission : aux roues arrière, boîte à 4 rapports + M.A.

• Pneumatiques : 140 x 40 (avant et arrière)

• Freins : tambours Lockheed (avant et arrière), commande hydraulique

• Longueur : 381,4 cm

• Largeur : 145 cm

• Hauteur : 154 cm

• Empattement : 265 cm

• Voie avant : 122,3 cm

• Voie arrière : 122,3 cm

• Poids (à vide) : 830 kg

• Vitesse maximale : 105 km/h

La Belna en chiffres

La Lancia Augusta a été produite dans l'usine historique de la marque à Borgo San Paolo dans la banlieue de Turin. La fabrication de la berline 4 portes (Type 231) a débuté le 1er février 1933 et s'est achevée le 14 décembre 1936 avec 14 107 exemplaires construits. Celle du Type 234 désignant les cabriolets 2 portes et les châssis nus s'étend d'avril 1934 à décembre 1936 et compte 3 110 exemplaires. La production de la Belna dans l'usine française de Lancia a lieu de 1934 à 1938 et représente 3 000 exemplaires dont 2 500 berlines (Type F31) et 500 châssis nus (Type F34). Ces derniers seront habillés par des carrossiers français réputés tel que Labourdette, Figoni & Falaschi, Saoutchik ou Paul Née, tandis que Marcel Pourtout obtient un contrat avec Lancia-France pour la fabrication de 326 voitures sur la base de châssis nus F34 (de décembre 1934 à avril 1937), réparties en 117 coupés "Éclipse" et 209 cabriolets 4 places. Au Salon de Paris de 1934, la Lancia Belna coûte 23 000 F pour le châssis nu, 28 500 F pour la berline 4 places et 30 500 F pour le cabriolet 2/4 places.

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