Au lendemain de son parcours triomphal en Championnat du Monde des Rallyes et en rallye raid, Peugeot Talbot Sport décide de s’attaquer à l’endurance avec sa nouvelle 905.

Lorsqu’en 1986, la Fédération Internationale du Sport Automobile relance le Championnat du Monde des Sport Prototypes, Peugeot Talbot Sport, qui sort d’une période particulièrement faste en rallyes avec la 205 T16, décide de relever ce nouveau défi. Le 23 novembre 1988, elle annonce son engagement officiel en endurance dans les deux années à venir. Grâce aux talents d’organisateur de Jean Todt, le directeur de PTS, la 905 va se couvrir de gloire durant trois années, de 1991 à 1993.

Au cours des quatre saisons durant lesquelles elle fut alignée en compétition, de 1990 à 1993, la Peugeot 905 a remporté 9 victoires en Championnat du Monde. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Peugeot

Avec le soutien de Jean Boillot, le Président d’Automobiles Peugeot Jean Todt constitue une équipe qui s’installe dans les nouveaux locaux du Centre technique PSA à Vélizy-Villacoublay, au sud-ouest de Paris. La direction technique est assurée par André De Cortanze, assisté de Robert Choulet qui est responsable des recherches aérodynamiques et de Jean-Pierre Boudy qui est chargé de la motorisation. La voiture, baptisée 905, est conçue en un temps record en étroite collaboration avec  le Groupe Dassault qui fournit les systèmes de CAO (conception assistée par ordinateur) permettant de dessiner le châssis. Le développement aérodynamique est réalisé par l’Imperial College de Londres ainsi qu’à la soufflerie de l’Institut Aérotechnique de Saint-Cyr-l’École. 

Le moteur V10 type SA 35, conçu par Jean-Pierre Boudy, sera utilisé sans défaillir sur l’ensemble des Peugeot 905 pendant quatre saisons avant d’être utilisé en F1. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Peugeot

Un triplé historique

La 905 est dévoilée officiellement en février 1990 et le 4 juillet elle effectue ses premiers essais aux mains de Jean-Pierre Jabouille sur le circuit de Magny-Cours. Elle est ensuite engagée dans les deux dernières épreuves du Championnat du Monde, à Montréal (abandon) et Mexico (13e). Ces deux courses tests révèlent l’excellent potentiel de la 905 qui va se confirmer au cours de la saison 1991 où elle remporte sa première victoire à Suzuka au Japon le 14 avril (Mauro Baldi et Philippe Alliot) suivie de deux autres à Magny-Cours et Mexico. Peugeot termine 2e au classement mondial derrière Jaguar, tandis que l’équipage Alliot-Baldi se classe 3e au Championnat des Pilotes. Seule ombre au tableau : les 24 Heures du Mans où les deux voitures alignées ont abandonné. La 905 dispute la saison 1992 avec la même réussite en remportant 5 des 6 manches du Championnat : Silverstone, Donington, Suzuka et Magny-Cours, mais surtout les 24 Heures du Mans avec l’équipage Warwick-Dalmas. Cette année-là, Peugeot Talbot Sport est sacré Champion du Monde des Voitures de Sport en catégorie C1-FIA Cup devant Toyota et Mazda. Parallèlement, Yannick Dalmas et Derek Warwick remportent conjointement le titre de Champion du Monde des Pilotes. Pour la saison 1993, Peugeot se concentre sur la seule épreuve des 24 Heures du Mans, disputée hors Championnat le 19 et 21 juin. Les trois voitures type Evo 1B engagées vont réaliser un véritable exploit en remportant les trois premières places : 1er : Brabham-Bouchut-Hélary, 2e : Dalmas-Boursen-Fabi et 3e : Alliot-Baldi-Jabouille. L’équipage victorieux a parcouru 375 tours, soit 5 100 km en 23 h 54 ‘ 12 ‘’, à la vitesse moyenne de 213,358 km/h.

Lors de la présentation officielle de la 905 en février 1990, on remarque le dessin des optiques et de la calandre parfaitement dans la lignée du style Peugeot de l’époque. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Peugeot

Une ultime version Evo 2

Dès le mois de mai 1991, les techniciens de Vélizy ont commencé à travailler sur une évolution de la 905 qui synthétise tous les enseignements acquis depuis les débuts de son engagement en endurance. La concrétisation de cette nouvelle voiture se fait en 9 mois à peine depuis le premier dessin assisté par ordinateur jusqu’à la construction du prototype. Hormis le V10 de 3,5 litres, cette version Evo 2 est radicalement différente de la précédente. La coque en carbone, plus étroite, forme un bloc compact sur lequel viennent s’ancrer les éléments mécaniques, beaucoup plus accessibles. La voiture a été pensée comme une Formule 1 carrossée, possédant une aérodynamique remarquable, obtenue grâce à de nombreux essais en soufflerie. Après un premier roulage sur l’aérodrome de Villacoublay le 29 juin 1992 et une séance d’essais réalisée par Jean-Pierre Jabouille au Castellet le 6 juillet suivant, la nouvelle 905, l’Evo 2, est présentée à la presse le 17 juillet à l’occasion des 500 km de Donington. Quand la FIA décide de remplacer le Championnat du Monde des marques par quelques courses symboliques comme le Mans ou Daytona pour la saison 1993, Peugeot prévoit de ne participer qu’aux 24 Heures du  Mans et Jean Todt préfèrera y aligner les versions Evo 1B plus éprouvées. Si bien que cette version Evo 2 avant-gardiste qui avait été surnommée « Supercopter » ne sera jamais alignée en course et finira au musée... À partir de 1994, le constructeur de Sochaux réalisera ensuite un parcours en demi-teinte comme motoriste en Formule 1 puis retrouvera à nouveau le succès avec les Rallyes WRC.

La 905 est un concentré de technologie, qui se présente comme une monoplace carénée avec un châssis en carbone doté d’une cellule centrale. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Peugeot

Peugeot 905 Évolution 1 Bis (24 H du Mans 1992)

• Moteur : Type SA35, 10 cylindres en V à 80°, longitudinal et central arrière

• Cylindrée : 3 499 cm3

• Alésage x course : 91 mm x 53,8 mm

• Puissance : 670 ch DIN environ

• Alimentation : injection Magneti-Marelli

• Allumage : électronique Magneti-Marelli

• Distribution : double arbre à cames en tête, 4 soupapes par cylindre

• Transmission : aux roues arrière, boîte de vitesses manuelle à 6 rapports + M.A.

• Pneumatiques : Michelin, 32 x 63 x 17 Avant, 34 x 70 x 18 Arrière

• Longueur : 480 cm

• Largeur : 196 cm

• Hauteur : 108 cm

• Empattement : 280 cm

• Voie avant : 163 cm

• Voie arrière : 155 cm

• Poids : 750 kg

• Vitesse maximale : 351 km/h (Philippe Alliot, record)

Peugeot  au Mans  

L’engagement de la 905 aux 24 Heures du Mans de 1991 revêt une importance certaine car, pour la première fois depuis 1926, Peugeot revient officiellement dans cette prestigieuse course d’endurance. Entre ces deux dates, la marque de Sochaux n’avait participé à cette épreuve que par l’intermédiaire de concurrents privés à qui elle fournissait ses moteurs. Comme ce fut le cas avec Darl’Mat en 1937 et 1938, Constantin de 1952 à 1955, CD (Charles Deutsch) en 1966 et 1967, ainsi que WM (Welter et Meunier) de 1976 à 1989. En 2007, Peugeot fait son grand retour aux 24 Heures du Mans, 14 ans après le triplé historique de la 905 en 1993. Classé 2e en 2007 et 2008, Peugeot Sport renoue avec la victoire dans la Sarthe lors de l’édition suivante grâce à la 908.