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LE V8 Alpine-Gordini
LE V8 Alpine-Gordini
L’ALLIANCE PARFAITE
Pendant toutes les années 1960, les appétits d’Alpine sur circuits s’aiguisent, mais il faudra attendre le moteur V8 d’Amédée Gordini pour engranger les victoires.
Avant de se recentrer avec bonheur, Alpine tirait tous azimuts dans le sport automobile : rallyes bien sûr, mais aussi vitesse et endurance, avec comme épreuve étalon les 24 Heures du Mans, où l’équipe s’engage en presque voisin dès 1963. Avec 1 000 cm3 et 95 ch pour le petit moteur quatre-cylindres de la M63 (« M » pour Le Mans, 63 pour l’année), pas de quoi rêver d’une victoire au scratch contre les Ferrari, mais la voiture est bien née et donne des idées.
Le stand Alpine au Mans en 1968. L’Alpine A220 est une très belle voiture... à défaut d’être suffisamment compétitive. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault D.R.
L ’évolution se fait pourtant : 1 150 cm3 et 105 ch pour la M64, 1 300 pour la M65. Mais dès cette année 1965, des rumeurs courent : Gordini préparerait un V8 pour Alpine.
Dans l’antre du sorcier…
Pour 1966, les noms des voitures changent (voir encadré). La nouvelle A210 est toujours une 1 300, mais le moteur V8 n’est plus un secret. Amédée Gordini n’en est pas à cette époque à son premier moteur huit-cylindres ; à vrai dire, le « sorcier » a testé toutes les solutions mécaniques dans son antre parisien : 4, 6 ou 8 cylindres, distribution culbutée, à un ou deux arbres à cames en tête, avec toutes sortes de rapports alésage × course... En 1953, Gordini s’était essayé à un huit-cylindres en ligne de 3 l de cylindrée développant 265 ch, pour des monoplaces de Grand Prix.
En 1965, l’homme n’en est donc pas à son coup d’essai lorsqu’il réfléchit à un moteur pour Alpine. Il s’agit d’un V8 ouvert à 90°, avec un seul vilebrequin (les moteurs en V à deux vilebrequins sont rares, mais ils existent), avec quatre manetons décalés de 180° et tournant sur cinq paliers, coiffé de deux culasses à double arbre à cames en tête. L’une de ses particularités est que les arbres à cames sont entraînés depuis le vilebrequin par des pignons, puis par une chaîne montant vers les culasses. Gordini va revendiquer une puissance intéressante de 311 ch à 7 800 tr/min dans sa version à deux soupapes par cylindre, et de 356 ch à 8 400 tr/min avec quatre soupapes ; le problème, c’est que le moteur ne tiendra jamais le coup à son régime maximal !
L’Alpine Renault A211 à moteur V8 Gordini, surprise ici en 1967 à Montlhéry. Au volant, Mauro Bianchi ou Henri Grandsire. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault D.R.
Les premiers aboiements du V8
C’est en 1967 qu’Alpine peut enfin tester le moteur V8. Celui-ci est installé dans une A210 transformée pour accepter un moteur presque deux fois plus lourd et plus de deux fois plus puissant que le quatre-cylindres qui la motorisait jusqu’alors ; il faut dire que le châssis est à l’époque largement sous-employé. L’A210 traditionnelle est équipée d’un moteur 1 500 cm3, avec de bons résultats aux 24 Heures du Mans, le prototype à moteur V8 reçoit donc l’appellation officieuse d’A211, tandis que les ingénieurs de châssis Marcel Hubert et Richard Bouleau s’occupent des plans de la future A220, l’Alpine conçue pour abriter un moteur V8 dès sa naissance.
Dans la revue Rétroviseur en 2006, le pilote Mauro Bianchi explique que, pendant les premiers essais, il a demandé à Amédée Gordini le régime maximum autorisé ; 8 000 tours, lui a-t-on répondu. Sur quoi, il est parti pour une séance et a rapidement cassé le moteur. Celui-ci remplacé, il a reposé la même question, qui s’est soldée cette fois par un prudent « 7 500 tours ». Retour en piste... et recasse, après un temps un peu plus long. Finalement, le régime où le moteur reste à peu près fiable se situe aux alentours de 7 000/7 200 tr/min, c’est-à-dire bien en deçà de celui censé donner toute la puissance. Ainsi, de 310 chevaux théoriques, on passe à de plus réalistes 250 ch utilisables, presque 100 de moins que les meilleurs ! C’est d’autant plus dommage que la nouvelle réglementation limitant la cylindrée des prototypes à 3 l favorisait par bonheur ce moteur.
En 1968, essais de l’Alpine en vue des 24 Heures du Mans ; on aperçoit Jean Rédélé de face (costume et cravate). © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault D.R.
Manque de développement
Le problème, finalement, ce sont les capacités limitées de la petite usine plutôt que les tares de ses voitures. À vouloir courir trois lièvres à la fois – monoplaces, endurance, rallyes, rappelons-le –, Alpine n’a pu être efficace sur tous les fronts. La fiabilisation du moteur V8 et son développement en ont pâti, de même que le châssis, domaine où la firme de Dieppe excelle pourtant. L’A220 se révèle trop lourde, 100 kg de plus que la Porsche, et préparée à l’arraché puisque, c’est devenu une triste habitude chez Alpine, elle n’est prête que très peu, trop peu de temps avant les essais préliminaires aux 24 Heures du Mans 1968.
Ce qui devait arriver arriva : les voitures cassent, et pis encore, Mauro Bianchi – associé en 1968 au jeune Patrick Depailler – est victime d’un grave accident dans son A220. Le moral de l’équipe est en berne, et ce n’est pas mieux l’année suivante, où les quatre A220 engagées doivent toutes abandonner. C’est la dernière apparition d’Alpine pour cette génération de voitures, Renault ayant décidé que sa crédibilité est en jeu après toutes ces déconvenues. La marque au losange reviendra au Mans avec d’autres ambitions quelques années plus tard, mais c’est une autre génération d’Alpine, et une toute autre histoire.
Aux 24 Heures du Mans 1968, l’Alpine de Vinatier/de Cortanze est arrêtée au stand de ravitaillement. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault / D.R.
Quarante ans plus tard…
Finalement, la décision de Renault de stopper le programme A220 a par là même stoppé le développement de la voiture, en particulier de son moteur. Il se trouve qu’un collectionneur passionné et compétent a pu continuer ce travail de développement sur une A220 survivante et restaurée : le châssis a été optimisé, comme les radiateurs de refroidissement du moteur – la surchauffe était l’un des problèmes du V8. Le moteur, justement, est confié à la Sodemo, société bien connue dont les moteurs de compétition modernes sont la spécialité, en particulier pour Renault et Peugeot, et qui possède également une branche « vintage » pour la restauration des moteurs anciens. Sodemo a ainsi pu terminer le développement du V8 Gordini achevé trop tôt. Amédée Gordini disait vrai : son moteur est bien capable de fournir sans faiblir 310 ch, c’est à présent avéré !
Pour aller plus loin...
1973, Championnat du Monde des Rallyes
Lorsque Jean Rédélé eut l’idée de sa première voiture, il lorgnait la compétition. Son coach A106, motorisé par un moteur de Renault 4 CV, fut alors dénommé « Mille Miles ». Immédiatement, un moteur de 845 cm3 issu de la Dauphine Gordini (35 ch DIN à 5 000 tr/min) vint l’épauler. Nous sommes alors en 1958 et, malgré des résultats plus que flatteurs, la Régie Renault ne suit cette carrière que d’un œil distrait. Il faut dire que l’on est en plein « boom » de l’automobile, et il n’est pas besoin de beaucoup forcer pour écouler une production de plus en plus importante. On veut bien savourer les lauriers de la victoire en compétition, mais sans ostentation, et surtout avec un minimum d’investissements ! La sortie de la R8 en 1962, et la fourniture de ses entrailles à Jean Rédélé, permettent au constructeur dieppois de sortir l’A110, évolution de l’A108. Les pièces sont composées notamment des quatre freins à disques et du moteur à cinq paliers. Le préparateur « maison » Mignotet monte le 1 100 cm3 porté à 80 ch, ce qui permet à la Berlinette de glaner nombre de couronnes lors de cette saison. Amédée Gordini se charge alors de gonfler les célèbres R8 éponymes, et les différentes évolutions (jusqu’à 1 600 cm3) seront testées conjointement par les services Course de Renault et d’Alpine, qui se sont rapprochés.
Enfin fiabilisée, la Berlinette A110 1800 a permis à Alpine en 1973 de décrocher le premier titre de Champion du monde Constructeurs en rallye. Bernard Darniche survole ici celui du Maroc et remporte une victoire incontestée. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault D.R. / Archives et Collections
ÉVOLUTIONS
En 1971, le Championnat d’Europe est remporté avec panache par les Alpine, pilotées entre autres par Andersson, Darniche et Nicolas. Le 1600 S (issu de la R16 TS) revisité est très performant, la maniabilité sans concurrence, et l’équipe Compétition menée par Jacques Cheinisse organisée à la perfection. L’année suivante, Mignotet utilise des moteurs 1 800 cm3 à la place des 1 600 et 1 680 cm3. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 1 796 cm3, 170 ch DIN à 7 200 tr/min et couple de 19,5 mkg à 5 200 tr/min, 685 kg. Mais cette saison 1972 dévoile une fragilité chronique dans les boîtes de vitesse qui s’accordent mal à ce rapport poids/ puissance/couple. Il faudra attendre la fin de saison pour que l’on utilise la boîte renforcée des nouvelles R12 Gordini. Les essais de fin de saison sont plus qu’encourageants, et c’est avec une large prétention au titre que toute l’équipe Alpine- Renault, nouvellement créée, se lance en 1973 dans le tout nouveau Championnat du monde des Rallyes (World Rally Championship ou WRC). Il sera délivré en fin de saison un titre « Constructeurs », précédant la mise en place du championnat « Pilotes et Copilotes » instauré en 1979.
Lors du Rallye de Monte- Carlo, les pneus neige étaient interdits. Pour cette première épreuve de la saison, Alpine a monopolisé le podium. Andersson et son copilote Jean Todt, ici en action sur une très épaisse couche de neige, ont terminé deuxièmes. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault D.R. / Archives et Collections
LA 1800
La Berlinette A110 1800 sera diffusée uniquement en version course. L’usine aligne ses bolides Groupe IV dans des versions affûtées, et au rapport poids/puissance imbattable (185 ch, 650 à 700 kg selon les rallyes). Elles prennent la dénomination A110 bis. La chasse au poids est drastique et les éléments de carrosserie n’ayant pas d’incidence sur la rigidité, en fibres de verre et résine polyester, ils sont amincis au maximum. À tel point qu’il ne faut s’asseoir ni sur les capots, ni sur le toit ! Les ailes sont élargies, viennent s’ajouter des déflecteurs avant ou même un becquet, tandis que les phares sont carénés. Les poignées de portières sont remplacées par des boutons-poussoirs afin de gagner encore quelques grammes. Les carburateurs Weber double-corps sont remplacés par l’injection, ce qui a permis le gain de puissance. Le train arrière à double triangulation est emprunté à l’A310, afin d’augmenter l’adhérence. La boîte R12 Gordini à pignons renforcés est validée, tandis que les freins à disques proviennent de la R16. Tout au long de la saison, on pourra voir trois types de carrosseries différentes. L’équipe de pilotes est composée de trois mousquetaires : Bernard « La Luge » Darniche, Jean-Pierre « Jumbo » Nicolas, Jean-Luc « Le Fox » Thérier, et épisodiquement de Jean- Claude « La Panique » Andruet, du Suédois Ove Andersson et de Jean-François Piot qui effectueront quelques piges. Le Championnat se déroule sur treize épreuves, mais Alpine-Renault n’en disputera que dix, le classement s’effectuant sur les neuf meilleurs résultats.
Jean-Luc Thérier dans ses œuvres lors du rallye du Portugal. Il décroche une de ses trois victoires de la saison avec maestria. Comme on peut le voir, il utilise à la limite l’exceptionnelle maniabilité de la Berlinette… devant un public peu conscient du danger. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault D.R. / Archives et Collections
LES ÉPREUVES
La saison 1973 débute par un magnifique résultat pour Renault-Alpine au Rallye de Monte-Carlo. Trois semaines après, la Suède offre un décor de neige et de glace, où les pilotes nordistes jouent dans leur jardin ; d’autant plus que les pneus cloutés sont interdits ! Derrière les Saab de Blomqvist et Eklund, Jean-Luc Thérier place la première Alpine sur le podium. Au Portugal, du 13 au 18 mars, Alpine aurait signé un triplé sans la guigne de Darniche qui survolait pourtant l’épreuve. Finalement, Thérier l’emporte devant Nicolas. L’équipe ayant fait l’impasse sur le East African Safari, tout le monde se retrouve en mai au Maroc. Sur 66 voitures, seules 13 sont à l’arrivée dont les trois Alpines engagées. Darniche gagne, Nicolas termine en cinquième position et Thérier est septième. C'est en Grèce, pour l'Acropolis, que la caravane se retrouve deux semaines plus tard. Jean-Luc Thérier fait un festival. En tête de bout en bout, il termine avec plus de sept minutes d’avance sur la Fiat 124 Spider du Finlandais Aaltonen. Nicolas, au prix d’une remontée fantastique après des ennuis d’embrayage, termine à la troisième place. L’écurie Alpine-Renault fait l’impasse sur les deux rallyes suivants. Waldegard domine les Alpes en Autriche au volant de sa BMW, avant d’être déclassé. Darniche hérite de la première place, et Nicolas termine au pied du podium. Lors du San Remo du 10 au 13 octobre, Thérier se rappelle au bon souvenir de ses adversaires. Il « tue » la course dès la première spéciale, et accentue son avance bien que l’on soit sur le terrain de Fiat qui, avec la 124 de Verini, termine deuxième devant l’Alpine de Nicolas. Dernier rendez-vous de la saison en Corse les 5 et 6 décembre 1973. Darniche, qui pilotait une version 1600 S, abandonne sur ennui mécanique, mais les Alpine triomphent de nouveau en monopolisant le podium (Nicolas, Piot et Thérier). En fin de saison, Alpine remporte donc le premier titre de Champion du monde des Constructeurs. Avec sept victoires et 160 points, la marque devance Fiat et Ford. Jean-Luc Thérier est sacré Champion de France des rallyes et si le titre mondial des Pilotes avait été décerné (il sera créé en 1979), il l’aurait également décroché !
Le Monte-Carlo 1973 : Triplé historique pour Alpine qui place six voitures dans les dix premières places ! © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault D.R. / Archives et Collections
Les trucs d’Amédée
Amédée Gordini n’a jamais bénéficié des moyens d’une grosse usine, mais il a dû se battre toute sa vie contre d’autres qui les avaient. Que ce soit avec Simca ou plus tard avec Renault via Alpine, Gordini doit compenser par l’ingéniosité, voire le génie – on ne l’appelle pas le sorcier pour rien –, les facilités pratiques qui lui manquent. Là où Ferrari et Porsche, par exemple, emploient des solutions audacieuses puisque les usines peuvent réaliser toutes sortes de pièces et se permettre de nombreux essais, Gordini, lui, doit faire simple dans son atelier, certes correctement outillé, mais sans sophistications. Les moteurs Gordini partagent ainsi, tous, cette rusticité venue de leur origine roturière, puisque la plupart d’entre eux sont à l’origine des moteurs de grandes séries (Simca, puis Renault 8) retravaillés et modifiés. Gordini s’est fait une spécialité de culasses double ACT en remplacement des vulgaires culasses « culbutées » d’origine. Mais, puisqu’il n’a pas à sa disposition de fonderie pour couler une telle culasse, il la fabrique pratiquement à la main, grâce à une manière très spéciale d’emboutir des pièces d’acier.
Des chiffres et des lettres
C’est en 1966 que l’appellation des Alpine d’endurance est unifiée avec le reste de la production sportive. Jusque-là en effet, les prototypes du Mans portaient la lettre M suivie de l’année d’utilisation, mais le problème est que, très souvent, de vieux modèles roulaient ; par exemple la M63 a roulé non seulement en 1963, mais aussi l’année suivante... et encore en 1965 !
Par ailleurs, les Alpine étaient baptisées en monoplace et en rallyes de la lettre A suivie d’un code (A270 pour les F2 par exemple ou… A110 pour les Berlinette). Décision est donc prise de rebaptiser la M65 en A210. Ainsi, il n’y a jamais eu de M66.