Lancia Astura

Rédaction : Albert Lallement  

L’héritage de la Lambda

En 1931, la Lambda arrive en fin de carrière et il ne faut pas moins de deux modèles, l’Artena et l’Astura, pour succéder au chef-d’œuvre de Vincenzo Lancia.

Pour reprendre les concepts techniques avant-gardistes de la Lambda, un premier modèle, la Dilambda, voit le jour en 1929. Mais elle est lancée en pleine crise économique mondiale et son prix élevé va limiter ses ventes à moins de 1 000 exemplaires en trois ans. Vincenzo Lancia mesure rapidement la situation et modifie ses projets en lançant l’étude de deux nouveaux modèles qui sont très proches, mais seulement extérieurement : l’Artena de gamme moyenne, à moteur V4 et l’Artena, haut de gamme à moteur V8, qui sont présentées au Salon de Paris de 1931.

L’Astura va inspirer les plus grands carrossiers du moment, comme Pinin Farina qui réalise ce cabriolet aux lignes élégamment épurées en 1938. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Lancia D.R.

Un seul modèle ne suffisait sans doute pas pour remplacer la fameuse Lambda qui avait bien évolué au cours de sa petite décennie d’existence, passant d’une Torpédo légère de 2,1 Litres à une Berline de luxe de 2,6 Litres. Vincenzo décide donc de proposer conjointement deux voitures, l’une relativement simple et économique, baptisée Artena, et l’autre, dénommée Astura, qui est une berline puissante et luxueuse, mais vendue nettement moins chère que la Dilambda qui figure toujours au catalogue de la marque. Avec ces deux modèles, ainsi que la petite berline populaire Augusta qui arrive en 1933, Lancia abandonne pour la première fois la dénomination liée à l’alphabet grec et choisit des noms de localités pour ses voitures. Cette démarche correspondait à l’esprit nationaliste du moment. Astura est en effet le nom d’un château historique situé à Nettuno au sud de Rome et Artena celui d’une petite ville qui est située à l’est de la capitale italienne.

L’habitacle de ce cabriolet est particulièrement soigné, mais sans luxe excessif. On remarque l’instrumentation de bord fournie par l’équipementier italien Metron, sous licence Jaeger. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Lancia D.R.

Des choix techniques différents

structure de châssis. Ce dernier peut sembler de prime abord de conception moins moderne que les précédents. Toutefois, en y regardant de plus près, force est de constater que l’innovation, image de marque de Lancia depuis ses débuts, va aussi loin, mais en suivant des voies différentes. La carrosserie autoporteuse inaugurée sur la Lambda a été délaissée au profit d’un classique châssis séparé à longerons caissonnés et renforcé par un croisillon. L’ensemble est prolongé à l’avant par une traverse de renfort qui supporte deux longerons légèrement convergents recevant le moteur. À l’arrière, la rigidité est assurée par une tôle soudée sur le dessus des longerons à l’extrémité du châssis. Tandis qu’à l’avant, si la calandre du radiateur en tôles épaisses a été supprimée, la rigidité est largement assurée par la traverse tubulaire de la suspension, ainsi que le solide bouclier boulonné en renfort. La suspension retenue pour le train avant est celle, particulièrement novatrice, inaugurée sur la Lambda. Elle est à roues indépendantes et comprend des ressorts hélicoïdaux verticaux associés à des amortisseurs télescopiques hydrauliques. À l’arrière, on trouve un classique essieu rigide avec des ressorts à lames semi-elliptiques et des amortisseurs à friction de type Siata. Mais des amortisseurs hydrauliques réglables depuis l’habitacle étaient disponibles en option. Par ailleurs, le moteur était lui-même suspendu par un inédit système composé de courts ressorts à lames rivés au châssis qui absorbaient de façon sensible les vibrations et les oscillations du V8.

Les carrosseries d’usine des premières Lancia Astura pouvaient parfois être un peu austères comme cette conduite intérieure quatre places de 1931. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © © Lancia D.R.

Quatre séries en neuf ans

L’Astura, tout comme l’Artena, ne sont pas des voitures révolutionnaires comme l’avait été de façon magistrale la Lambda, mais elles poursuivaient fidèlement le chemin avant-gardiste ouvert par leur devancière neuf années plus tôt. Elles se distinguent en progressant significativement au niveau du confort, de la facilité de conduite et du silence en marche. Au point que l’Astura de troisième série (lancée en 1933) est considérée par la presse spécialisée comme l’une des toutes meilleures voitures européennes de la classe 3 Litres commercialisées à l’époque. Au premier coup d’œil, l’Artena et l’Astura présentent beaucoup de similitudes, ce qui s’explique par le souci de standardisation adoptée pour des motifs économiques. Toutes deux sont proposées avec des carrosseries «usine» basiques : berlines quatre places ou limousine six places. La différence se situant au niveau du châssis, avec un empattement plus long de 19 cm en moyenne pour l’Astura, afin d’accueillir son V8, plus volumineux. La première série d’Astura (1931-1932) Type 230, tout comme la deuxième (1932-1933) Type 230 également, dispose encore du V8 ouvert à 19° de 2 604 cm3 (Type 85) développant 72 ch. La troisième série est proposée en deux versions : Type 233L («Lungo» produit de 1933 à 1937) et 233C («Corto» produit de 1933 à 1936) avec un empattement respectivement long de 333,2 cm et 310 cm. Cette série qui bénéficie du nouveau V8 ouvert à 17° 30’ de 2 972 cm3 (Type 91) offrant 10 ch de mieux, va intéresser les plus grands carrossiers du moment qui vont doter l’Astura de carrosseries flamboyantes. Avec la quatrième série (1937-1939) Type 241 dotée d’un empattement de 347,5 cm se termine la carrière de ce modèle qui a été produit à 2 912 exemplaires de 1931 à 1939, toutes versions confondues. 

Cette Astura “Barchetta” a été commandée à la Carrozzeria Colli en 1939 par la Scuderia Ambrosiana pour son pilote Luigi Villoresi. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Lancia D.R.

Sur ce catalogue du premier salon de l’Astura, à Paris, en octobre 1931, on distingue la suspension à ressorts en chandelles et amortisseurs télescopiques. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Lancia D.R.

Fiche technique

Lancia Astura Type 233 C (1936)

• Moteur : type 91, 8 cylindres en V à 17° 30’, monobloc, longitudinal avant

• Cylindrée : 2 972,99 cm3

• Alésage x course : 74,61 mm x 85 mm

• Puissance : 82 ch à 4 000 tr/mn

• Alimentation : carburateur vertical inversé double corps Zenith 30 DVI

• Allumage : Bobine et distributeur Bosch

• Distribution : arbre à cames central en tête, 2 soupapes verticales par cylindre

• Transmission : aux roues arrière, boîte à 4 rapports + M.A.

• Pneumatiques : 15 x 45 (avant et arrière)

• Freins : mécaniques, tambours (avant et arrière), servo frein Dewandre 

• Longueur : 452 cm

• Largeur : 164,2 cm

• Hauteur : non connue

• Empattement : 310 cm

• Voie avant : 137,4 cm

• Voie arrière : 140 cm

• Poids (à vide) : 960 kg

• Vitesse maximale : 130 km/h

La Lancia Astura en course

L’Astura a réalisé sa carrière sportive essentiellement après-guerre, mais dans les années 1930, elle a déjà signé quelques beaux exploits. Ainsi aux Mille Miglia de 1934, l’Astura biplace pilotée par Carlo Pintacuda et Mario Nardilli remporte la catégorie Tourisme plus de 2 Litres et se classe 10e au général. Deux mois plus tard, le même équipage remporte la première édition du Giro Automobilistico d’Italia (également appelée Coppa d’Oro del Littorio à l’époque), tandis qu’une autre Astura pilotée par Giuseppe Farina et Ernesto Oneto s’y classe 3e. Aux 10 Heures de Spa de la même année, trois Lancia Astura prennent les 2e, 3e et 4e places de leur catégorie 2 001 à 3 000 cm³ (derrière une Bugatti) avec les équipages Pintacuda-Nardilli, Dickey-Garrey et Gouvion-Guerini. Après la guerre, une Astura Spider de la Scuderia Ambrosiana pilotée par Franco Cortese remporte deux épreuves hors championnat en 1946 à Luino et Modène. Le dernier succès majeur de l’Astura a lieu en 1950, lors de la course de côte de Scala di Giocca à Osilo, avec la victoire de catégorie 1 100 Sport et la 2e place au classement général obtenues par E. Manca.

Articles récents
PORSCHE 911 CARRERA 2.8 RSR

PORSCHE 911 CARRERA 2.8 RSR

Un seul mot d’ordre : réduire le poids et obtenir plus de chevaux du moteur Lire la suite
PORSCHE 935/78 « Moby Dick »

PORSCHE 935/78 « Moby Dick »

Trois ans d’évolution pour arriver à 850 ch de puissance Lire la suite

Partager ce post

Paiement 100% sécurisé Paiement 100% sécurisé
Emballage sécurisé Emballage sécurisé
Transport sécurisé Transport sécurisé
Abonnement flexible Abonnement flexible