Raymond Loewy

Rédaction : Albert Lallement  

La «French Touch» !

Designer éclectique parmi les plus célèbres de tous, Raymond Loewy s’est penché sur la Lancia Flaminia pour créer en 1960 une interprétation très personnelle baptisée Coupé Loraymo.

Le design automobile fut l’une des branches d’activité les plus originales et créatives de ce talentueux touche à tout franco-américain. S’il œuvra essentiellement pour les plus grands constructeurs de son pays d’adoption, il traversa toutefois ponctuellement l’Atlantique afin de dessiner quelques carrosseries pour des marques du vieux continent. Lancia et BMW, qui étaient déjà diffusées aux États-Unis, eurent cette chance, tout comme le carrossier français Pichon & Parat.

Le Maestro devant une esquisse évoquant la calandre en “réacteur” que l’on retrouvera sur la gamme Studebaker de 1950. Il fallait oser... © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Courtoisie RL studio

Par son talent, la force de sa personnalité, son énergie, son flair, son génie pour se faire connaître et faire reconnaître sa profession, ainsi que sa capacité de faire sa place dans des domaines très différents, Raymond Loewy a dominé la profession qu’il avait contribué à créer, celle de designer industriel. Plus que personne d’autre, il a convaincu les entreprises de l’importance du design, et ses dessins épurés pour des milliers de biens de consommation et leur emballage ont radicalement changé l’aspect de la vie américaine au cours du 20e siècle.

Raymond Loewy et son épouse Viola May posant fièrement devant le dernier opus du designer, la Lancia Loraymo de 1960, qui restera sa voiture personnelle durant plusieurs années. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Courtoisie RL studio

La mode pour commencer

Avant de devenir l’un des pionniers du design industriel américain et l’un des créateurs du Streamline moderne, plus communément appelé style paquebot, Raymond Loewy a exercé toutes sortes d’activités. Raymond Fernand Loewy est né le 5 novembre 1893 dans le 2e arrondissement de Paris. En 1910, il intègre l’École Duvignau de Lanneau, avec le projet de devenir ingénieur, mais la Grande Guerre vient contrarier ses projets. Il sert dans le Génie, détaché au sein du Corps Expéditionnaire Américain. Libéré de l’armée en 1919 avec le grade de Capitaine, il traverse l’Atlantique pour rejoindre son frère aîné Maximilien à New York. Il commence alors une carrière d’illustrateur au sein du groupe de presse Condé Nast, qui édite des périodiques de mode réputés tels que Vogue, Vanity Fair ou Harper’s Bazaar. Il réalise son premier projet dans ce que l’on n’appelle pas encore le design industriel pour le fabricant de machines à dupliquer Gestetner. Les choses vont ensuite très vite et il fonde sa première agence, Raymond Loewy, William Snaith, Inc., à New York en 1929, qui deviendra Raymond Loewy and Associates en 1944. Au cours des années qui suivent, il s’affirme avec des créations marquantes pour Hupp Motor Company (son premier contact avec l’automobile) en 1930, Sears Roebuck avec le réfrigérateur Coldspot en 1934 ou encore la Pennsylvania Railroad pour laquelle il dessine l’impressionnante locomotive électrique GG-1 en 1936.

Raymond Loewy fait la couverture du 31 octobre 1949 du Time, illustrée par Boris Artzybasheff, avec le titre “He streamnines the sales curve” (Il aérodynamise les courbes de vente). © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Times / D.R. 

Un créateur de formes

l serait long et fastidieux de faire une liste exhaustive de toutes les créations de Loewy tant elles sont nombreuses et dans une multitude de domaines. On lui doit les créations graphiques mondialement connus pour Coca-Cola, Lucky Strike, Shell, Lu, New Man ou encore United Airlines. Il a également conçu de nombreux objets du quotidien, symboles de «l’American Way of Life» : mobilier, vaisselle, électroménager… L’automobile ne fut pas en reste avec des lignes innovantes pour Studebaker, comme la Starlight (1947), la Starliner (1953) ou l’Avanti (1962), mais aussi pour les bus Greyhound (1954). Il a de plus créé la décoration extérieure du Boeing  707 Air Force One du Président  John Kennedy en 1962. À partir de 1967, Raymond Loewy devient consultant de la NASA pour les projets habités Apollo et Skylab. En 1972, le magazine LIFE l’a désigné comme l’un des Américains les plus influents du 20e siècle. En 1980, il revient vivre en France où il s’éteint le 14 juillet 1986.

Restaurée dans les années 1990 par le Musée Lancia de Turin, l’exemplaire unique de la Loraymo est régulièrement exposé dans les salons de voitures anciennes tels que Rétromobile. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Archives & Collections D.R.

La Loraymo

Au 47e Salon de l’Automobile de Paris, début octobre 1960, Raymond Loewy livre son interprétation du coupé Flaminia. La réalisation de la carrosserie a été confiée à l’entreprise turinoise Rocco Motto, un spécialiste de l’aluminium que Loewy voulait aider à se faire connaître et sur le stand duquel la voiture est exposée. Ce qui est son unique travail sur un modèle de la marque Lancia, reste un coup de maître remarqué, même si son dessin ne fait pas l’unanimité à l’époque. Ce modèle unique est appelé Loraymo qui est l’acronyme du prénom et du nom du dessinateur (LOewy RAYMOnd) et qui correspond alors également à l’adresse télégraphique de son studio de design à New York. La Loraymo reprend donc le châssis de la Flaminia ainsi que son moteur V6 Type 823.00 de 2,5 litres dont la puissance passe de 119 ch à près de 150 ch après modification chez Nardi. La Loraymo possède des courbes larges inspirées de la bouteille de Coca-Cola que Raymond Loewy avait contribué à moderniser en son temps. Devenue très populaire dans le design automobile américain à partir du milieu des années 1960, cette forme qui constitue une signature caractéristique du studio Loewy est encore inhabituelles lorsque la Loraymo est présentée. Dès le début, Raymond Loewy a conçu cette Lancia unique comme sa voiture personnelle qu’il utilisera pendant des années, d’abord en Europe, puis aux États-Unis. Elle est ensuite vendue et on perd sa trace jusqu’à ce qu’elle soit retrouvée à la fin des années 1980 par le Club Lancia d’Amérique. La Loraymo est alors offerte au musée Lancia de Turin qui l’a depuis parfaitement restaurée.

Raymond Loewy et le président de Studebaker, Sherwood Egbert, à côté du coupé Avanti de 1962, un modèle qui représentait “l’idéal” automobile recherché par le designer. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Studebaker

Une certaine vision du monde

Raymond Loewy avait des idées et un avis sur tout ce qui l’entourait. À commencer par l’automobile qui selon lui  «doit avoir l’air rapide et, même à l’arrêt, suggérer par ses lignes le mouvement en avant.» De manière générale, il affirmait que «La laideur se vend mal», ce qui restera son credo commercial tout au long de sa carrière et qui donnera le titre en français de ses mémoires publiées par Gallimard en 1953. Mais on lui doit surtout une vision très avant-gardiste du design qu’il a résumée par quatre lettres : MAYA, pour Most Advanced Yet Acceptable qui pourrait se traduire en français par «très osé mais acceptable.» Son principe consiste à apprendre à concevoir pour l’avenir, tout en équilibrant cette conception avec le stade actuel de compétences et d’état d’esprit des utilisateurs visés. Ce qu’il a parfaitement réussi avec la modernisation de la bouteille de Coca-Cola, la création du logo du pétrolier Shell ou de celui de la marque spécialisée dans le prêt-à-porter New Man, qui restent complètement intemporels.

Un bel hommage

Au lendemain de la disparition de Raymond Loewy, les médias internationaux saluent unanimement son talent et ses contributions incommensurables au design industriel. Dans ce sens, les lignes de Susan Heller Anderson, journaliste au New York Times sont éloquentes : “Difficile d’ouvrir une bière ou un soft-drink, de préparer le petit déjeuner, de monter en avion, d’envoyer une lettre par la Poste ou de faire du shopping sans rencontrer une création de Loewy.” Démontrés à maintes reprises, les concepts graphiques de Loewy continuent d’être pertinents bien des années après leur création, le faisant entrer à juste titre dans l’histoire comme le père du design industriel.

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