Renault 5 Alpine

Rédaction : Albert Lallement  

La première GTI française

En 1976, quatre années après la sortie de la Renault 5, la Régie en présente une version résolument sportive, la R5 Alpine qui sera construite dans l’usine Alpine de Dieppe.

Présentée en mars 1976, la version sportive de la Renault 5 emboîte le pas à la Volkswagen Golf GTI, lancée six mois plus tôt, dans une nouvelle catégorie de petites berlines compactes musclées qui va séduire toute une génération de pilotes amateurs. Dans ce sens, la R5 Alpine s’inscrit dans la lignée des R8 et R12 Gordini, mais avec ce modèle, Renault tourne une page et en confie la fabrication à Alpine, entrée dans le giron de la Régie en 1972.  

Jusqu’au lancement de la Peugeot 205 GTI, la R5 Alpine sera la seule sportive française pouvant concurrencer la Volkswagen Golf GTI. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault D.R. 

L ’idée des dirigeants de Renault est de capitaliser sur les succès sportifs de la marque Alpine, notamment ceux de la Berlinette A 110 qui a remporté le Championnat du Monde des Rallyes en 1973, mais aussi en endurance et en monoplace. Ainsi les sportives de série de la marque au losange seront elles désormais frappées du sigle Alpine et seront produites sur le site de l’avenue de Bréauté à Dieppe. La Renault 5 Alpine inaugure cette organisation qui sera poursuivie avec la R5 Turbo en 1980.

Le bouclier avant avec ses phares antibrouillard ainsi que les liserés rouges et les marquages soulignent le caractère sportif de la R5 Alpine.   © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo © Renault D.R.

La citadine se muscle

Quatre ans après la présentation de la R5 en 1972, la Régie décide d’en produire une version plus musclée. Avec le millésime 1974, une version Renault 5 LS de 64 ch avait précédemment vu le jour, offrant des performances suffisantes pour donner des idées aux responsables de Billancourt tels que Jean Terramorsi, le sous-directeur Produit. Féru de course automobile, ce dernier souhaite rendre plus cohérente l’implication de Renault en compétition. Ce qui se traduira par la création de Renault Sport et, entre autres, l’exploitation du modèle phare de la marque au losange, la R5, dans plusieurs disciplines. Dans un premier temps, il avait été envisagé d’installer un moteur 1 600 cm3 sous le capot de la petite citadine, mais le projet n’aboutira pas, faute de place. Parallèlement, une étude avait été lancée par des membres du SAV d’Alpine à Dieppe sous l’égide de Dominique Guérin. L’idée étant de partir d’un R5 TS  qui roule à 150 km/h et de préparer la voiture pour qu’elle puisse atteindre 180 km/h ! 

Cette vue fantôme permet de visualiser la disposition du moteur, en arrière de l’essieu avant, avec la boîte de vitesses placée devant et longitudinalement.© IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo ©  Renault D.R.

Produite à Dieppe

L’adoption de la mécanique de la Renault 16 TX rendra possible la conception de ce qui va devenir la Renault 5 Alpine (Type Mines R 1223) qui voit le jour en mars 1976. La Renault 5 Alpine est assemblée dans l’usine Alpine de Dieppe où les caisses arrivent de l’usine de Flins pour recevoir les éléments mécaniques et les équipements spécifiques de ce modèle. Les trains roulants qui proviennent de la R5 TS ont été modifiés pour être plus réactifs, si bien que la voiture est rabaissée de 4 cm par rapport à une Renault 5 de base. La coque a été renforcée au niveau des passages d’ailes avant et des joues d’ailes arrière. Extérieurement, la R5 Alpine dispose des accessoires d’une sportive, avec notamment un bouclier avant doté de phares antibrouillard, des rétroviseurs type Vitalino California et des jantes en tôle type Fergat qui laisseront place à des jantes «bobine» à partir de 1977. Enfin, ce modèle s’identifie du premier coup d’œil grâce aux filets rouges qui courent sur la ceinture de caisse et le retour de capot ainsi que le fameux A fléché associé au chiffre 5 apposé sur les quatre faces de la carrosserie.

La R5 Alpine va se révéler une formidable machine de course sur circuit et en rallye, comme ici au Mille Pistes de 1978 où Jean Ragnotti et Jean-Marc Andrié se classeront 11e. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo ©  Renault / D.R.

Second souffle

Le moteur retenu est le vénérable Cléon fonte qui possède une cylindrée de 1 397 cm3 et offre une puissance de 93 ch DIN à 6 450 tr/mn, pour un couple maximum de 11,65 mkg à 4 000 tr/mn. Le bloc en fonte dispose d’un vilebrequin reposant sur cinq paliers. Il est surmonté d’une culasse en alliage d’aluminium à chambres de combustion hémisphériques de type Cross-flow (héritage de la Renault 8 Gordini) avec admission d’un côté et échappement de l’autre. La boîte de vitesses à 5 rapports provient également de la R16 TX. En septembre 1981, la Renault 5 Alpine laisse la place à une version encore plus performante, baptisée R5 Alpine Turbo. Comme son nom l’indique, le moteur  de 1 397 cm3 se voit équipé d’un turbocompresseur  Garrett T3 refroidi par eau qui permet à la puissance de grimper à 110 ch DIN à  6000 tr/mn pour un couple maximum de 15,7 mkg à 4 000 tr/mn. 

La vitesse de pointe atteinte est maintenant de 186 km/h avec un 400 m et un 1 000 m départ arrêté réalisés respectivement en 16"1 et 30"2. Selon les chiffres fournis par le Service du Patrimoine Renault, la Renault 5 Alpine a été construite à 55 942 exemplaires de 1975 à 1981, plus 674 version Coupe. La Renault 5 Alpine Turbo (renommée R5 Lauréate Turbo à partir d’avril 1984) a, quant à elle, été construite à 23 425 exemplaires de 1981 à 1984, plus 706 version Coupe. Ce qui fait une production totale de 80 747 exemplaires.

Pour aller plus loin...

La version anglaise

Peu après la sortie de la Renault 5 Alpine sur le marché français, la branche Renault United Kingdom Ltd commercialise ce modèle dans les concessions britanniques. La voiture dispose logiquement d'une conduite à droite, mais voit surtout son appellation modifiée en Renault Gordini. L'explication est que le nom d'Alpine avait en effet été déposé en 1953 par le constructeur anglais Sunbeam pour sa gamme de cabriolets et ce, deux années avant la création de la marque Alpine par Jean Rédélé. PSA ayant racheté le groupe Roots, propriétaire de Sunbeam, au milieu des années 1970, la filiale Peugeot-Talbot UK interdira à Renault d'utiliser la dénomination Alpine au Royaume-Uni. Extérieurement, le modèle anglais se distingue par un sigle Gordini sur la calandre et G5 sur l'aile arrière en lieu et place de l'habituel A5 de l'équivalent français. La mécanique est sensiblement la même, si ce n'est qu'un système EGR a été ajouté pour répondre aux normes antipollution.

Extérieurement, la version britannique de la Renault 5 Alpine se distingue par un marquage "Gordini", ainsi qu'un double filet différent le long de la carrosserie. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo ©  Renault D.R. / Archives et Collections

L'héritière

La production de la Renault 5 Alpine Turbo s'arrête en juillet 1984 et au Salon de Paris de cette même année, la Renault Supercinq est dévoilée. Au mois de mars 1985, une version GT Turbo est présentée comme étant la descendante en ligne directe de la Renault 5 Alpine Turbo. La Renault 5 GT Turbo en reprend d'ailleurs le moteur de 1 397 cm3 qui développe désormais 115 ch à 5 750 tr/m, (soit 5 ch de plus que la version précédente) grâce au montage d'un turbo Garrett T2. Pendant plusieurs années, cette voiture  se positionne comme la concurrente directe de la Peugeot 205 GTI qui a fait son apparition l'année précédente. En 1987, la GT Turbo Phase 2 est lancée, dotée d'un moteur de 120 ch dont une série limitée "Alain Oreille" (pilote Renault en Groupe A) est produite à 2 000 exemplaires en 1989 dans l'usine Renault de Vilvoorde en Belgique. La production de la R5 GT Turbo cesse en 1991 après 162 253 exemplaires construits, toutes versions confondues.

La Renault 5 GT Turbo Phase 2 qui fait son apparition en 1987 dispose d'une nouvelle calandre et de nouvelles jantes. Elle ne sera pas produite à Dieppe, mais dans l'usine de Flins. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo ©  Renault D.R. / Archives et Collections

Les hommages de la presse.

L'arrivée de la Renault 5 Alpine est unanimement saluée, tant une petite sportive héritière de la R8 Gordini ou de la Simca Rallye était attendue. Dès le mois d'avril 1976, Jean-Paul Thevenet réalise un essai complet du bolide pour L'Automobile qu'il introduit ainsi : "Vis-à-vis de la clientèle jeune, Alpine est un énorme capital de prestige. Aujourd'hui, en partant de la Renault 5, on mélange à cette portion d'histoire, une bonne dose de marketing et la Régie lance un cocktail assez étonnant, car, croyez-nous, 170 km/h au volant d'une Renault 5, cela donne envie de raconter".  Dans Échappements d'août suivant, Pierre Pagani écrit : "La R5 Alpine est amusante à conduire. Vive, légèrement sous-vireuse, on peut tout de même la faire glisser de l'arrière si on le désire..." Plus tard, dans Sport Auto d'octobre 1981, José Rosinski explique : "La R5 Alpine munie d'un turbo, c'est un autre registre. La voiture est encore plus vivante..." À la même époque, pour Échappements, Gilles Dupré qualifie sa tenue de route d'enthousiasmante, ajoutant : "Autant avec l'atmo qu'avec la turbo, on note une tenue de route globalement efficace, mais il est vrai que la motricité atteint rapidement ses limites en appui".

Dès sa sortie, la presse automobile réalise de nombreux essais du nouveau phénomène Renault 5 Alpine. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo ©  Renault D.R. / Archives et Collections

Exploit au Monte Carlo

En 1978, malgré les préparatifs en vue des 24 Heures du Mans et les débuts en Formule 1, Renault Sport décide d'engager deux Renault 5 Alpine officielles au 46e Rallye de Monte Carlo. On s'attendait à ce qu'elles ne fassent pas long feu face aux favorites telles que les Fiat 131 Abarth, Lancia Stratos et autres Porsche Carrera 3 Litres, mais contre toute attente, les R5 Alpine vont faire sensation. Sur des routes particulièrement enneigées, les petites voitures aux couleurs Calberson tirent leur épingle du jeu et à l'issue du parcours de concentration, elles sont en tête du classement provisoire. À l'arrivée, Jean Ragnotti et Jean Marc Andrié (N° 19) terminent 2e au général et 1er du Groupe 2, devant Guy Fréquelin et Jean-Marc Andrié (N° 12), tandis que la victoire revient à la Porsche Carrera de Jean-Pierre Nicolas et Vincent Laverne. Lors de l'édition suivante de 1979, La R5 Alpine se classera honorablement avec une 8e place au général pour Guy Fréquelin et Jacques Delaval.

La Renault 5 Alpine de Groupe 2 (Voitures de tourisme spéciales), ici celle pilotée par Jean Ragnotti au Monte Carlo de 1978, dispose d'un moteur de 1 398 cm3 développant 135 ch. © IXO Collections SAS - Tous droits réservés. Crédits photo ©  Renault D.R. / Archives et Collections

La Coupe R5 Alpine

En 1975, est lancée la Coupe de France Renault 5 Elf qui succède à la Coupe Renault 8 Gordini (1966-1970) et Renault 12 Gordini (1971-1974). Dans un premier temps et pendant trois saisons, le modèle choisi par Renault pour cette formule de promotion monotype est la R5 LS, la version la plus sportive du moment. L’arrivée de la Renault 5 Alpine lui ouvre logiquement les portes de la Coupe du même nom avec les lauréats suivants : Jean-Pierre Lajournade (1978), Éric Houdeletk (1979), Denis Derepas (1980) et Francis Canal (1981). La montée en puissance avec la version Turbo s’accompagne d’une nouvelle Coupe Renault 5 Alpine Turbo, successivement remportée par Manuel Carvalho (1982), Jean-Michel Bernes (1983) et Jean-Claude Dutrey (1984), avant de laisser place à la Coupe Renault 5 GT Turbo de 1985 à 1990. Parallèlement au championnat français de cette discipline, une Coupe d’Europe Renault 5 Alpine est organisée de 1976 à 1978 avant de laisser place, après deux ans d’interruption, à la Coupe d’Europe R5 Turbo de 1981 à 1984.

Renault 5 Alpine (Type R 1223 de 1976)

• Moteur : type C2J-P7-13, 4 cylindres en ligne, longitudinal avant

• Cylindrée : 1 397 cm3

• Alésage x course : 76 mm x 77 mm

• Puissance : 93 ch à 6 450 tr/mn

• Alimentation : carburateur inversé double corps Weber 32 DIR 58

• Allumage : batterie, bobine, allumeur (Ducellier)

• Distribution : arbre à cames latéral, tiges et culbuteurs, 2 soupapes en tête (en V) par cylindre

• Transmission : Type NG5.002, aux roues avant, boîte à 5 rapports + M.A.

• Pneumatiques : 155-70 HR 13 (avant et arrière)

• Freins : disques à l’avant, tambours à l’arrière, double circuit et servo-frein à dépression

• Longueur : 355,8 cm

• Largeur : 152,5 cm

• Hauteur : 130,8 cm

• Empattement : 241,2 cm

• Voie avant : 129,4 cm

• Voie arrière : 127 cm

• Poids (à vide) : 850 kg

• Vitesse maximale : 170 km/h

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